Page:Vermersch - Les incendiaires, 1910.djvu/10

Cette page a été validée par deux contributeurs.

Pure comme une symphonie,
blanche comme les ramiers blancs.

J’aspire pendant la bataille,
Tandis que siffle la mitraille,
À la paix douce, à l’aube, au jour,
Sans ambition plus farouche
Que de pouvoir baiser la bouche
Où naîtront les propos d’amour.

J’abhorre la guerre, et je rêve
Aux siècles lointains où le glaive
Aura la forme d’une faulx ;
Où la gloire n’aura de palmes
Que pour les héros forts et calmes
Faisant des biens avec nos maux ;

Et j’appelle l’heure azurée
Où les hommes, troupe sacrée,
Avec le lait, avec le miel,
Revêtus de tuniques blanches,
Iront célébrer sous les branches,
L’apaisement universel.


III

 

Nos vainqueurs disaient : « Faisons taire
La clameur de ces mécontents !
Pour être heureux, purgeons la terre
De ces coquins, de ces brigands !
Vit-on jamais peuple semblable ?
Ça pleure, hurle et fait diable
Parce qu’il crève un peu de faim ?
Il se regimbe ! Il nous reproche
De nous empiffrer de brioche
Quand il n’a même pas un morceau de pain ?

« Ces propos sont intolérables !
Mâtons ces révoltés amers !
Entre nous et ces misérables
Mettons l’immensité des mers !
Leur voix quelquefois nous réveille
Et monte dans l’aube vermeille,
Chassant nos songes effarés !
Pontons, perdez-vous dans la brume !