Filles
I
Bonne simple fille des rues
Combien te préféré-je aux grues
Qui nous encombrent le trottoir
De leur traîne, mon décrottoir,
Poseuses et bêtes poupées
Rien que de chiffons occupées
Ou de courses et de paris
Fléaux déchaînés sur Paris !
Toi, tu m’es un vrai camarade
Qui la nuit monterait en grade
Et même dans les draps câlins
Garderait des airs masculins,
Amante à la bonne franquette,
L’amie à travers la coquette
Qu’il te faut bien être un petit
Pour agacer mon appétit.
Oui, tu possèdes des manières
Si farceusement garçonnières
Qu’on croit presque faire un péché
(Pardonné puisqu’il est caché).
Sinon que t’as les fesses blanches,
De frais bras ronds et d’amples hanches
Et remplaces que tu n’as pas
Par tant d’orthodoxes appas.
T’es un copain tant t’es bonne âme,
Tant t’es toujours tout feu, tout flamme
S’il s’agit d’obliger les gens
Fût-ce avec tes pauvres argents
Jusqu’à doubler ta rude ouvrage,
Jusqu’à mettre du linge en gage !
Comme nous t’as eu des malheurs,
Et tes larmes valent nos pleurs
Et tes pleurs mêlés à nos larmes
Ont leurs salaces et leurs charmes,
Et de cette pitié que tu
Nous portes sort une vertu.