tiellement incertaine, elle aussi, obscure, indécise, complexe, et parfois jolie, souriante, bienveillante et claire, — mais plus rarement ! Et pour être poète, selon moi, il faut vivre beaucoup, dans tous les sens, — et s’en souvenir. Alfred de Musset a dit cela infiniment mieux que tous mes efforts ne sauraient le faire, et il a laissé une œuvre vivante, l’œuvre vivante par excellence, bien que ne s’étant pas assez donné tout entier. Il avait ses raisons, qui étaient surtout de vouloir ainsi. Mais il eût pu, sinon dû faire plus. N’importe, c’est un grand poète tout de même. Un artiste ? Oui, cent fois oui. Un artiste parfait ? Non, car la vie sentie, exprimée même bien, même admirablement, ne suffit pas à cette tâche. Il faut travailler et travailler comme un ouvrier : tels les poètes romans, incontestablement.
De sorte qu’à mon sens, le poète doit être absolument sincère, mais absolument consciencieux comme écrivain, ne rien cacher de lui-même, mais déployer dans cette franchise, avec toute la dignité exigible, le souci de cette dignité se manifestant dans autant que possible, sinon la perfection de la forme, du moins l’effort invisible, insensible, mais effectif vers cette haute et sévère qualité, j’allais dire cette vertu.
Un poète qui est moi a tenté cette besogne.