Mais le tout, en guerre, surtout en guerre civile,
n’est pas d’avoir un drapeau : il faut avoir
une cible. Les contemporains n’étaient pas suffisants
pour ces Messieurs. De même qu’il leur
avait fallu un grand homme mort pour enseigne,
il leur en fallait un autre pour but de leurs
coups.
Et ce grand mort-là se trouva Shakespeare.
Shakespeare, à première vue de gens de vue courte, l’antithèse de Racine, ce Shakespeare tant vilipendé de Voltaire, qui l’avait nommé de tous les noms, « sauvage ivre », « ignorant », etc.
Voltaire, — au fond grand homme et peu voltairien — les jours où il se livrait à sa verve contre l’auteur d’Othello (qu’il travestit en Zaïre), les jours pires encore où il méritait ces éloges de Frédéric II de Prusse : « Vous avez bien fait de refaire, selon les principes, la pièce informe de cet Anglais » (la pièce informe c’était Jules César), Voltaire, certes était alors voltairien dans le sens mesquin, étroit, parlons franchement, bête du mot. Voltairiens aussi, mesquins, étroits, bêtes aussi se montrèrent, en répétant les fades et platement grotesques « critiques » du triste rimailleur de Nanine et d’Alzire,les enragés adversaires du romantisme, et « enragés » ici n’est pas de trop. N’allèrent-ils pas en effet, alors qu’il