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les hommes d’aujourd'hui

gens assez malheureux pour ne le point connaître au physique, mérite, non seulement d’être vu avec sa physionomie franche et fine, sa prestance bien portante et bien portée et la gaîté du meilleur aloi qui l’illumine tout entier non sans des reflets de forte et haute philosophie, mais encore d’être entendu, car sa conversation est charmante de verve malicieuse comme il faut et cordiale sans les inconvénients du trop ou du trop peu, et sait discerner, préférer, écarter, haïr bien et encore mieux aimer, sans erreur, ni préjugé, ni faiblesse, ni rien pour infirmer la ferme exquisité de son jugement.

Mais c’est surtout d’être lu qu’il mérite !

Car Raoul Ponchon est un poète très original, un écrivain absolument soi, descendant, c’est clair, d’une tradition, ainsi que tous, du reste, mais d’une tradition « de la première » française en diable, avec tout le diable au corps et tout l’esprit du diable, d’un bon diable tendre aux pauvres diable et diablement spirituel, coloré, musical, joli comme tout, fin comme l’ambre, léger, tel Ariel, et amusant, tel Puck, bon rimeur (j’ai mes idées sur la Rime et quand je dis « bon rimeur » je m’entends à merveille et c’est de ma part le suprême éloge) excellent versificateur aussi (je m’entends encore) un écrivain, enfin, tout saveur, un poète tout sympathie !

J’ai parlé des ascendants littéraires de Raoul Pon-