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les hommes d’aujourd'hui

légère myopie tenait un peu incliné. Les yeux bleu clair avaient une douceur virile qui prévenait dès le premier abord. La voix était mélodieuse et comme tendre, un enjouement mélancolique donnait à la conversation, toujours intéressante au possible, un charme exquis.

Ce jour-là nous parlâmes art, peinture surtout. Je le quittai, ravi.

De quelques années plus jeune que lui, je n’avais guère produit que de l’inédit et je restai timide devant l’auteur déjà connu des lettrés de ces Stances et Poèmes qui, avec Philoméla, de Catulle Mendès, et les Vignes folles, de ce regretté Glatigny, constituèrent les fiers débuts de la Renaissance poétique d’alors et d’aujourd’hui. J’admirais beaucoup ces vers un peu maigres, mais d’une correction des plus plaisantes en cette période de jeunes poètes lâchés, lamartiniens sans génie, hugohitres sans talents, mussetistes qui n’avaient du maître que l’envers de sa paresse divine. De plus, un vrai souci du rythme et de la rime éclatait partout dans le compact volume qui avait mis immédiatement hors de page l’auteur et ses livres suivants. Je me souviens très nettement de l’effet des plus puissants produit sur moi par la pièce sur un arbre traversant en chariot le faubourg Saint-Antoine :


On redevient sauvage à l’odeur des forêts !