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quinze jours en hollande

costume, surtout celui des femmes est bien particulier et doit dater de loin. C’était un dimanche. La cloche de la modeste église au clocher pointu appelait au prêche ces sincères et vraiment protestants de cœur plus que de théologie, si l’on peut parler beaucoup de cœur en parlant du protestantisme, — mais je ne parle ici que de protestants ignorants, humbles, simples, comme les vrais catholiques de nos côtes. Puis on voit la mer. La mer ! il y avait longtemps que je ne l’avais vue, ni respiré son air sauveur. Elle est très belle, d’une mélancolie au soleil presque couchant, très calme et qui lèche la plage où sommeillent, je ne sais comment arrivées là, quelques rares barques de pêche (je ne crois pas qu’il y ait d’autre port). D’autres barques, innombrables, paraît-il, sont « au large » avec leurs petites voiles noires, qui souvent impuissantes, les trahissent quoi qu’elles en aient,


« Et ça se dit sombrer ! »


comme dit si spécialement le matelot Corbière.

La voiture nous ramène à travers des dunes où font piteuse mine à côté du village travailleur et pieux d’en bas, les luxes morts, la camelote vaniteuse des gens qui vont — t’aux eaux (je vais aux z-eaux, tu vas zozo, etc.), casinos en bois peints, « splendid hôtels », boarding houses et autres illé-