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quinze jours en hollande

par cela même… Quant aux constructions modernes permettez-moi de n’y point insister. Elles sont ce que tout en tous lieux leurs congénères, utiles, mais mastoc et sans pour ainsi dire d’art. J’en excepte le Palais de Justice que je devais voir quelques semaines après lors d’un tour en Belgique, monument babélique situé encore sur une hauteur et dont le dôme doré selon moi insuffisamment et pas assez large, domine toute la ville et la campagne autour, œuvre folle mais géniale, rara avis en ce temps d’unanime médiocratie.

Oui, Bruxelles est une aimable ville, même vue de cette façon, pour ainsi parler, cursive, et je comprends bien que le poète d’Isaac Laquedem y ait fait se ralentir son héros, causer avec des « bourgeois fort dociles » et boire en cette bonne compagnie une ou plusieurs chopes de faro : ce dut lui être un oasis de trop courte paresse dans le vertigineux désert de sa course maudite.

Et nous filons sur Anvers, — campagne agricole, plaines immenses toutes ou presque toutes en prairies, toutes aux vaches et aux moutons, parsemées de clairs villages et d’élégants « châteaux » un peu biscornus mais si amusants tout de même. Puis ça change et c’est la Campine : de la sévérité dans la quasi-stérilité quasiment déjà marine, mais près d’Anvers la verdure reprend, verdure que volontiers j’appellerais militaire, car voici des forts comme à