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confessions

nais avec le regret que celle-ci ne pût être « tout au moins » royale, et nos stations aux devantures des bijoutiers et des magasins de linge fin étaient sans nombre.

Tout allait donc au mieux pour nous et le matin de l’avant-veille de la date bénie put contempler mon réveil ravi, mon allée allègre au bureau après le meilleur baiser donné à ma mère, un peu soucieuse, elle aussi, à cause des nouvelles de la guerre et de leur influence probable sur les délibérations des Chambres, mais enchantée de ma présente belle humeur ; enfin, mon zèle administratif, objet de l’admiration légèrement inquiète de mes collègues qui n’en avaient jamais tant vu de ma part et de mes chefs littéralement ahuris.

Oui, tout allait au mieux, quand vers la fin de la journée bureaucratique, aux environs de quatre heures et demie, cinq heures, dans la lumière affadissante de la grande pièce aux murs bondés de cartons pleins de paperasseries, où nous étions quatre derrière des paravents et devant des tables à casiers, chargés à en rompre d’autres paperasseries en désordre, de lourds encriers, de grimaces hérissées d’épingles, à noircir d’affreuses feuilles blanches à en-têtes imprimés, avec des formules toujours les mêmes, mandat de paiement de trimestre, etc., et des noms, Guglielmini, Belloir, et tutti quanti, je vis, entrer, pâle, défait, méconnais-