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les poètes maudits



RENONCEMENT


Pardonnez-moi, Seigneur, mon visage attristé…
Mais, sous le front joyeux, vous aviez mis les larmes :
Et de vos dons, Seigneur, ce don seul m’est resté.

C’est le moins envié ; c’est le meilleur, peut-être.
Je n’ai plus à mourir à mes liens de fleurs.
Ils vous sont tous rendus, cher auteur de mon être,
Et je n’ai plus à moi que le sel de mes pleurs…

Les fleurs sont pour l’enfant, le sel est pour la femme :
Faites-en l’innocence et trempez-y mes jours.
Seigneur, quand tout ce sel aura lavé mon âme,
Vous me rendrez un cœur pour vous aimer toujours.

Tous mes étonnements sont finis sur la terre,
Tous mes adieux sont faits, l’âme est prête à jaillir
Pour atteindre à ses fruits protégés de mystère
Que la pudique mort a seule osé cueillir.

Ô Sauveur ! Soyez tendre au moins à d’autres mères
Par amour pour la nôtre et par pitié pour nous.
Baptisez leurs enfants de nos larmes amères
Et relevez les miens tombés à vos genoux.


Comme cette tristesse surpasse celle d’Olympio et d’à Olympio, quelque beaux (le dernier surtout) que soient ces deux poèmes orgueilleux ! Mais,