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mes prisons


Mais revenons à l’ameublement. J’en avais omis, une pièce, et non la moins importante. Je veux parler de l’adjudant ou gardien-chef de l’aile où j’étais alors (les gardiens subalternes avaient le titre de sergent, je l’ai dit déjà). Cet adjudant, dis-je, ne m’avait pas pris en affection, et s’il me visitait souvent, ce n’était pas pour me voir, mais bel et bien pour m’inspecter. Et s’ensuivaient des observations sans nombre, voire des menaces de cachot, à propos d’un grain de poussière, d’un pli mal fait à la couverte repliée dans mon lit-table, lorsque le lit redevenait table, même de quelque chose, à son sens, d’irrégulier sur ma personne, mon tour de cou pas à l’ordonnance, tel bouton de ma veste branlant, etc. Ce qu’il m’a fait souffrir cet animal-là avec ses féroces minuties ! D’ailleurs bon diable et qui devait s’humaniser un peu plus tard, à mon égard du moins.

La nourriture ? Eh, parbleu toujours de la soupe… à l’orge, et les dimanches la purée de pois. Pain de munition, eau à discrétion.

Le dimanche, messe, vêpres et salut chantés par des détenus. Harmonium tenu par une dame de la ville, sermons bien faits par l’aumônier, homme charmant dont j’ai gardé le meilleur et le plus reconnaissant souvenir.

La chapelle, très extraordinaire : au contraire de ce qui a lieu dans la plupart des prisons cellu-