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mes prisons

cuillers de fer. Cette pâtée ! De l’orge à la graisse, évidemment, de cheval : je m’y connais, moi, parisien du Siège. J’y goûte du bout de la langue : j’en ai avalé, enfin, environ un quart, quand l’adjudant :

Gratias, etc.


et l’on entre dans la cour, où je suis à peine que l’on m’appelle chez le Directeur. À travers beaucoup de couloirs (les Petits-Carmes étant, comme le nom l’indique, un ancien couvent), j’arrive, à la longue, accompagné d’un gardien, la main sur son coupe-choux, chez ce potentat qui, après avoir congédié l’estafier, me dit :

— Veuillez vous asseoir, monsieur Verlaine.

Enfin, une parole de politesse après tout ce torrent d’humiliations. Je regardai le Directeur, un petit homme tout en moustaches et les favoris grisonnants, binocle derrière quoi des yeux perçants, pas méchants, dans une chaise-fauteuil. Extraordinairement, lui, alors, argenté. Tel, vers 1850-1851, un général de la garde nationale, et des torsades à n’en plus finir ! Il tient à la main une lettre à moi adressée par Victor Hugo.

(De l’Amigo j’avais écrit au Maître pour le prier d’une intervention auprès d’une personne chère, alors.)

Le Directeur : — Je viens de lire ces quelques mots qui vous sont adressés, et je m’étonne, ayant