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mes prisons


Après le plus court, mais, grâce à un insouci à moi plus peut-être qu’à mon compagnon, des conséquences qui pouvaient s’ensuivre pour votre serviteur, le plus circonstancié des procès-verbaux (est-ce bien l’expression ?), le magistrat, relâcha Rimbaud, tout naturellement, mais en le prévenant d’avoir à se tenir à la disposition et décida que je serai conduit sur-le-champ à « l’Amigo ».

Ce nom cordial, vestige de l’occupation espagnole aux xvie et xviie siècles, rend bien notre mot français « violon » pour désigner un poste de police. Cet Amigo n’étant à quelques pas de l’Hôtel de Ville j’y fus bientôt, escorté de deux sbires dont cette fois un brigadier ou sous-brigadier, ces galons-là m’indifférant fort à cette époque et, le dirai-je ? — depuis. Pas beau, par exemple, l’Amigo. Propre tout au plus, et le fier mérite au pays de la propreté à outrance ! Comme j’avais de l’argent sur moi — c’est tout, avec mes habits, ce qu’on m’avait laissé au commissariat — on me mit d’office à la pistole ce qui au fond est bien. Mais la cette pistole, prenant air et jour par un vasistas situé trop haut, avec, dedans, deux lits, deux tables et deux chaises, et toutes autres commodités, une exceptée, omises, ne me procura pas la paix comportée : un ivrogne bien mis, fléau pire ! n’ayant pas tardé à partager mon sort, se rendit insupportable de toute façon toute la nuit. Et du dehors, des chants, des