Page:Verlaine - Œuvres complètes, Vanier, IV.djvu/410

Cette page a été validée par deux contributeurs.
400
mes prisons

appela le premier, et il ressortit bientôt de l’important cabinet les yeux moites encore et avec un clin d’œil comme d’alarme à mon adresse. Je pénétrai à mon tour chez le premier magistrat debout de l’endroit, lequel, assis dans un rond de cuir où il semblait plutôt vissé, m’interrogea, coupant cette formalité de pas mal rogues observations sur la tenue de mon pantalon blanc un peu terni, de fait, par la poussière du voyage, en outre de quelque usage préalable et subséquent. Quelques objurgations furent ensuite mâchonnées : « Une exécution vient d’avoir lieu à A… Regrettables, ces conversations topiques (sic) en un endroit public et dans de telles conjonctures… Peuvent donner prise à des soupçons peut-être justes… À preuve… Vous voyez… Après tout, qu’est-ce que vous veniez faire ici ? Avec ce jeune homme qui semble d’ailleurs convenable et respectueux de la justice ? Mais encore une fois, que veniez-vous faire ici ? Mis ainsi tous deux, et sans bagages, n’est-ce pas ?… Oui… Eh bien ? vous voyez. »

J’expliquai mon cas, fantaisie, promenade en compagnie d’un ami, — ce, nettement, assez carrément même. J’étais plus républicain qu’à présent, je sortais d’être un peu communard, et j’avais le verbe passablement haut. Après références en ville données, « papiers » montrés, lettres, passeports, billets de banque (ô Temps, suspends ton vol !),