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mémoires d’un veuf

dire, et la présence là de gymnastes en costume et d’orphéonistes ficelés des dimanches ne lui revenait pas trop. Mais ces couronnes ! Mais le corbillard des pauvres et la touchante idée de l’entourer d’un bataillon scolaire, quelle tramontane ça faisait perdre au pauvre homme, quelles campagnes il en battait, quel poing sur ce dynamomètre !

Le corbillard des pauvres lui suggérait bien des divagations. À le considérer comme pur et simple parmi tant de somptuosités, il disait, interprète de son client, ce véhicule orgueilleux : « Ah ! ah ! tas d’imbéciles, tourbe de badauds, vous avez blagué mes antithèses de mon vivant ; eh bien, voilà ma dernière et c’est la bonne, pleurez et erudimini. » Et c’est qu’en effet beaucoup de larmes furent répandues ce jour-là, au milieu même de la rigolade générale. Tel l’acte pour mouchoirs à un théâtre de mélodrame. « Ô peuple, ajoutait la voiture hautaine, peuple absurde qui m’as fichu des balles heureusement maladroites, en Juin 48, qu’en penses-tu ? J’ai ton seul carrosse. Mais ce n’est pas toi qui aurais les moyens de te payer gratis un tel supplément. Il est vrai qu’il me coûte cher le louage de ton baquet : 50.000 fr. à répartir entre 200.000 pauvres ! »

Et mille autres billevesées.

L’entrée au Panthéon lui plaisait et lui déplaisait.

C’est trop, c’est trop, raisonnait sa folie. On ne doit bousculer personne, surtout les saints qui exis-