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élégies

Je voulais simplement dire qu’elles sont belles
Juste au point et que je les baise comme telles
Et non pas comme des châsses ou des bons dieux
En bois ou de métal plus ou moins précieux,
Mais bien comme les mains chères d’une maîtresse
Tant aimée et donnant la suprême caresse
Sur mon front essuyé, sur mes mains qu’elles font
Littéralement leurs, d’un fluide profond
Et calmant, d’une fièvre ainsi communiquée
Qu’elle va jusqu’à l’âme on dirait fatiguée,
Et l’endormant dans un rêve d’aise et d’ébat.

Quant aux poignets, que j’insultai d’un propos plat.
Toujours à cause des susdites résistances.
Il convient, mon amour, qu’âprement tu me lances
D’une erreur volontaire, et je confesse ici
Qu’ils sont parfaits, mignons et gras, roses ainsi
Qu’une rose-thé rose plus que de coutume,
À preuve que tantôt encor dans l’amertume
D’un remords pour des mots trop vifs que j’avais dits
Et les ayant baisés, pour voir le paradis.
Le pardon, refleurir sur ta bouche si bonne.
Parmi le bleu lacis des veines où, gai, sonne
Ton pouls tumultueux d’un courroux passager,
(Espérais-je !) j’en ai gardé, pour y songer
Longtemps, le souvenir de satin et de soie.

Ô tes mains, les dispensatrices de ma joie !