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n’existerait plus si Rembrandt ne l’avait prononcé comme le nom de son premier maître.

Harmen Gerritszoon est meunier. C’est donc dans un moulin, dans une maison de vent, de pluie et de soleil que s’est écoulée l’enfance de son fils.

Un moulin est ailé, il vibre, tremble, s’agite ; il tourne, il se meut, il change à chaque instant d’aspect, il n’appartient guère qu’à l’espace et à l’air ; tout l’infini le traverse. Pour un artiste, le moulin est un logis idéal. Il y peut étudier à l’intérieur mille effets de lumière presque surnaturelle et, dès qu’il en sort, toute la nature comme transfigurée apparaît devant lui. La première habitation de Rembrandt est donc située comme au delà de la vie. Plus tard quand il aura élu domicile dans les villes, sa préoccupation constante sera de se recréer quelque séjour idéal, qui lui rappelle celui de son enfance. Il n’y parviendra jamais. Il l’essayera toujours.

Après les premières leçons reçues chez Swanenburgh, il partit pour Amsterdam. Il entra en 1623 comme élève chez Lastman. Ce maître, comme la plupart de ses contemporains hollandais, inclinait vers l’art italien. Il travaillait en contrariant sa nature. Septentrional, il s’était épris d’un goût et d’un style étrangers et son œuvre hybride se diminuait au fur et à mesure qu’à ses yeux elle se rapprochait d’une décevante grandeur.

Pourtant il ne fut pas sans exercer sur Rembrandt une certaine influence. Peut-être la disposition asymétrique de ses sujets et l’accoutrement bizarre et exotique