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soit la nature merveilleuse et surnaturelle, est exprimé avec des blancs et des noirs, avec des formes harmonieusement peintes.

Aujourd’hui il règne dans toutes les collections et sa place y est prépondérante. Le Louvre, la National Gallery, les musées d’Amsterdam, de Munich, de Dresde, de Saint-Pétersbourg, de La Haye sont spécialement rayonnants de ses œuvres. Le Prado de Madrid, les Uffizi, les collections romaines et vénitiennes sont les moins bien partagées. Rembrandt ne fut jamais un homme de cour comme Rubens, Titien ou Velazquez. Les grands n’ont point sacré de leur faveur ni de leurs louanges son œuvre haute. C’est la critique enfin revenue d’engouements séculaires et de préjugés d’écoles qui, la première, avec les grands peintres du siècle dernier, l’a mise en valeur et en rayonnement. C’est Fromentin, c’est Charles Blanc, c’est Vosmaer, c’est Burger, c’est Dutuit, c’est Taine. Ce sont les érudits : MM. Bode, Bredius, de Roever et Émile Michel. Sandrart et van Hoogstraeten, dès le XVIIe siècle, l’avaient célébré ; mais depuis leurs travaux, si l’on en excepte le catalogue publié par Gersaint, ami de Watteau, rien de sérieux ni de digne n’avait été tenté.

Peut être entrait-il dans le destin du plus grand et du plus original des peintres de ne devoir sa réhabilitation qu’à l’art lui-même. Or, jamais comme au siècle dernier, l’art n’entra dans la vie de tous. Avant cette époque, il était considéré comme une fleur de luxe ; seuls les rois et les seigneurs le connaissaient et l’appréciaient ; il s’isolait du