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Les fronts, les bras, les mains des turbulents métiers

Étaient son front, ses bras, ses mains, étaient sa force.
Il rangeait en faisceaux leurs volontés retorses,

Il était à lui seul un peuple tout entier.


Tous les grondements sourds et violents des rages,

Tous les éclairs et tous les feux de la fureur,
Passaient si bien du cœur des autres en son cœur

Qu’il était comme armé de leur mouvant orage.


Et sage autant que ferme, il entreprenait tout.

Rien au monde jamais ne put vaincre sa tête :
Quand il sentit tomber le soir de sa défaite,

Son âme ardait encor comme du fer qui bout.


II


Longtemps il vécut seul, sans manier les foules :

Leurs colères, leurs cris, leurs triomphes, leurs houles
Ne battaient point de leurs flots arrogants
Sa tranquille maison sise en un coin de Gand,

Le long des eaux, à la Biloque.