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les débacles


Se cravacher dans sa pensée et dans son sang,
Dans son effort, dans son espoir, dans son blasphème ;
Et s’exalter de ce mépris, vain lui-même,
Mais qui rachète un peu l’orgueil d’où l’on descend.

Et se mesquiniser en pratiques futiles
Et se faire petit et n’avoir qu’âpreté,
Pour tout ce qui n’est point d’une âcre nullité,
Dans le jardin vanné des floraisons hostiles.

Je rêve une existence en un cloître de fer
Brûlée au jeûne et sèche et râpée aux cilices,
Où l’on abolirait, en de muets supplices,
Par seule ardeur de l’âme enfin, toute la chair,

Oh ! la constante rage à s’écraser, la hargne
À se tant torturer, à se tant amoindrir,
Que tout l’être n’est plus vivant que pour souffrir
Et se fait de son mal sa joie et son épargne.