Page:Verhaeren - Poèmes, t1, 1895, 2e éd.djvu/61

Cette page a été validée par deux contributeurs.
55
les bords de la route

II


Sur le bloc de granit ancien, mordu de fer,
Une idole est debout — le mystère la masque :
Un diamant se mêle à la nuit de son casque ;

Sur le bloc de granit ancien, mordu de fer,
Elle impose, là-bas, son dardement de pierre,
Sans que depuis mille ans ait bougé sa paupière ;

Sur le bloc de granit ancien, mordu de fer,
Le chef qui se prolonge, ainsi que des murailles,
Redresse immensément un front de funérailles ;

Sur le bloc de granit ancien, mordu de fer,
Les deux seins noirs, pareils à deux lunes funèbres,
Laissent deux baisers froids tomber en des ténèbres ;

Sur le bloc de granit ancien, mordu de fer,
Les hauts bras étendus dont les mains sont coupées,
Tendaient pour les vaincus l’orgueil droit des épées ;