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les moines


Ils portent devant eux leur grande crosse en buis,
Majestueusement, comme un glaive conquis ;

Ils parlent au chapitre en justiciers gothiques,
Et leur arrêt confond les pénitents mystiques ;

Ils rêvent de combats dont Dieu serait le prix
Et de guerre menée à coups de crucifix ;

Ils sont les gardiens blancs des chrétiennes idées,
Qui restent au couchant sur le monde accoudées ;

Ils vivent sans sortir de leur rêve infécond,
Mais ce rêve est si haut qu’on ne voit pas leur front ;

Leur chimère grandit et monte avec leur âge
Et monte d’autant plus qu’on la cingle et l’outrage ;

Et jusqu’au bout leur foi luira d’un feu vermeil,
Comme un monument d’or ouvert dans le soleil.