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les flamandes

I


À droite, au long de noirs chemins, creusés d’ornières,
Avec des tufs derrière et des fumiers devant,
S’étendent, le toit bas, le mur nu, des chaumières,
Sous des lames de pluie et des soufflets de vent.
Ce sont leurs fermes. Là, c’est leur clocher d’église,
Taché de suintements vert-de-grisés au nord,
Et plus loin, où le sol fumé se fertilise,
Grâce à l’acharnement des herses qui le mord,
Sont leurs labours. La vie est close tout entière
Entre ces trois témoins de leur rusticité,
Qui les ploient au servage et tiennent en lisière
L’effort de leur labeur et de leur âpreté.
Ils sont là, travaillant de leurs mains obstinées
Les terreaux noirs, l’humus tout imprégné d’hiver,
Pourri de détritus et creux de taupinées ;
Ils bêchent, front en eau, du pied plantant le fer,
Le corps en deux, sur les sillons qu’ils ensemencent,
Sous les grêlons de Mars qui flagellent leur dos.
L’été, quand les moissons de seigle se balancent
Avec des éclats d’or, tombant des cieux à flots,