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Lassé des mots, lassé des livres,
Je veux le glaive enfin qui taille
Ma victoire, dans la bataille.

Et je songe, comme on prie, à tous ceux
Qui jaillissent, héros ou Dieux,
À l’horizon de la famille humaine ;
Comme des arcs-en-ciel prodigieux,
Ils se posent, sur les domaines
De la misère et de la haine ;
Les effluves de leur exemple
Pénètrent l’air, les murs, les clos, les temples,
Si bien que la foule, soudain,
Voulant aimer, voulant connaître
Le sens nouveau qu’impose, avec hauteur, leur être,
Aux attitudes du destin,
Déjà sculpte son âme à leur image,
Pendant que disputent et s’embrouillent encor,
À coups de textes morts
Et de dogmes, les sages.

Alors, on voit les paroles armées
Planer sur les luttes et les exploits
Et, clairs, monter les fronts et vibrantes, les voix
Et — foudre et or — voler au loin les Renommées ;
Alors, aussi, ceux qui réchauffent leur âme,