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Les chiens casser leur chaîne et les taureaux
S’ériger lourds et leurs soufflants naseaux,
Dans l’étable nocturne, ameuter la tempête.

Ce mont,
Avec son ombre, en prière, devant lui,
Plombait de son mystère et de sa nuit
Les cœurs naïfs et leurs affres secrètes.

Il incarnait l’immensité,
Ses murs dataient des premiers temps du monde,
Des forêts d’or avaient grandi, s’étaient entées
Sur sa base, pour s’élever et s’abaisser
Et retomber, vers les plaines fécondes
Et ressurgir encor de leur poussière.
Les siècles le sacraient — et l’on eût dit à voir
L’énorme entassement se bossuer, le soir,
Qu’un orage, soudainement, s’était fait pierre.

Je suis entré avec des torches, au cœur du mont,
Ombres et feux semblaient sortir de moi,
Ils projetaient leur vol brusque, sur les parois,
De l’un à l’autre bout, des salles colossales.

Les déesses, les nains, les ors profonds