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Il est d’éternité, comme la vie,
Violente, prodigieuse, inassouvie,
Depuis toujours jusques jamais.

Il est d’éternité et se complaît
En son rêve qui se défait
Et se refait, au long des soirs et des aurores
Et des saisons d’ébène et d’or, qui le décorent.

Tout ce qui fut jadis par les grands dieux sublimes
Jeté en flamme et en orages, dans l’espace,
Illumine ses cimes ;
Ses troncs, ramus d’audace,
Vibrent et frissonnent encore
D’avoir été le corps d’écorce et d’or
Des satyres railleurs écorchés par la foudre ;
Aux flancs de ses rochers que les micas saupoudrent,
Étincellent les Oréades nues ;
Le visage d’argent de la déesse blanche
Vers ses bergers dormant, près des sources, se penche,
L’eau de ses lacs, où se mirent les nues,
Reste froide d’avoir baigné les chairs de jade
Et les crins verts des luisantes Hamadryades.

Et tout ce que mêlèrent les poètes,