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Midi les arrête dans les fossés
Matelassés de feuilles, pour leur sieste ;
Ils sont les éternellement lassés
De leur prière et de leur geste,
Si bien qu’au seuil des fermes solitaires
Ils apparaissent, tels des filous,
Le soir, dans la brusque lumière
D’une porte ouverte tout à coup.

Les mendiants ont l’air de fous.

Ils s’avancent, par l’âpreté
Et la stérilité du paysage,
Qu’ils reflètent, au fond des yeux
Tristes de leur visage ;
Avec leurs hardes et leurs loques
Et leur marche qui les disloque,
L’été, parmi les champs nouveaux,
Ils épouvantent les oiseaux ;
Et maintenant que décembre sur les bruyères
S’acharne et mord
Et gèle, au fond des bières