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Plein de feux ravageurs et de flammes brandies.

Mais plus son cœur souffrait,
Plus l’amertume ou la rancœur y pénétrait,
Plus il se préparait à soi-même d’obstacles
Pour éloigner l’instant de foudre et de miracle
Qui tout à coup éclairerait tout son labeur,
Mieux il élaborait en son âme croyante
L’œuvre sombre et flamboyante
Dont il portait en lui le triomphe et la peur.

Ce fut au temps de Mai, quand sonnaient les matines,
Que Michel-Ange, enfin, rentra dans la Sixtine
Avec la force en son cerveau.
Il avait ramassé son idée en faisceaux :
Des groupes nets et sûrs, d’une ligne ample et fière,
Se mouvaient devant lui dans l’égale lumière.
L’échafaudage était dressé si fermement
Qu’il aurait pu mener jusques au firmament.
Un grand jour lumineux se glissait sous la voûte,