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Distingue le chemin qui le conduit vers Dieu.
Voici la vie, après combien de jours, ouverte
À la saine croyance et la libre ferveur.
L’idée humaine, enfin, marche à sa découverte
Et prend le jeune orgueil pour guide et pour sauveur.
Il n’importe que tonne encor la voix romaine,
Luther a sous l’orage engrangé la moisson.
Sa force, il l’a trouvée en son âme germaine
Que la nature entière emplit de son frisson,
Il est homme de passion franche : il le crie ;
La vigne de la chair, il la veut vendanger.
Jamais, il n’est à bout de sa propre furie
Ni de sa joie âpre et folle d’être en danger.
Il est terrible et gai ; son humeur est soudaine ;
Il est contradictoire avec ténacité ;
Tous les fleuves d’amour, tous les torrents de haine
Creusent, sans le trouer, son grand cœur exalté ;
Il demeure inquiet jusque dans sa victoire,
Et, quand la mort s’étend de son cœur à son front,
On dirait que la nuit couvre d’une aile noire,
De roc en roc, les flancs et le sommet d’un mont.