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Crue et rêche, l’herbe est rasée.
On suit, à fleur de sol, les empreintes laissées
Du vol circulaire des faux.
Les foins, de jour en jour, tassent leurs monts plus haut.
Et pour les emporter voici les attelages
Si lourds et si compacts et si monumentaux,
Qu’à leur rentrée on croira voir, le soir, par les hameaux,
Des granges pleines qui voyagent.

Et lorsque le dernier charroi
Entre les toits balancera le poids
De sa charge dernière,
La fille la plus forte et le plus fier des gas
Se camperont en haut du tas,
Les corps noyés dans l’or et la poussière,
La crasse et la sueur plaquant leur peau
Et brandissant, ainsi que des hérauts,
Au-dessus de leurs fronts durs et têtus, la faux
Toute stridente de lumière.

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