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Et le mur est humide, et le sable est mouillé
Qui festonne les pieds de l’armoire en noyer,
Où le pain dort non loin du beurre ;
Et le jardin précis de houx et de palmiers,
Qu’inscrivit sur la vitre un givre régulier,
Dans son châssis de bois se dissout d’heure en heure.

La tour d’église, au cœur du bourg, ne se voit pas,
Si drus sont les flocons qui s’égrènent par tas.
Tuiles rouges et vernissées,
Et vous, pignons, vous vous cachez sous les frimas ;
À peine un aboiement s’entend, torpide et las,
Là bas, où le chien veille en sa niche glacée.

Dans sa cage d’osier, l’oiseau boude et se tait ;
Près des fournils déserts grincent, dans l’air muet,
Les verrous durs d’une poterne ;
Et pour l’instant du soir où la traite se fait,
Parmi les bidons gras et les luisants baquets,
La servante épand l’huile en de creuses lanternes.