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Leurs maigres doigts minutieux
D’instinct font des gestes rapaces ;
Parmi les rides de leur face,
Rien ne bouge que les deux yeux.

Sous les combles, sous les dallages,
Au trou d’un mur ou d’un sommier,
Même aux fentes de leurs fumiers,
Ils enfouissent l’argent volage.

Fermiers hâves, marchands malins,
Cerveaux étroits, âmes féroces,
Comme des pois au creux des cosses,
Dorment et s’empilent leurs gains.

Dans leur logis, plein de silence,
Jamais ne dort leur vigilance ;
Ils se chauffent avec du foin ;
Ils voient venir, vers eux, de loin,
Ceux des hameaux et des villages
Dont ils craignent les commérages ;