Ta volonté jetée en proie à leur torrent
Et vous vous maudissiez tout en vous adorant.
Oh leurs élans, leurs chocs, leurs blasphèmes, leurs crimes
Et leurs meurtres plantés dans le torse des lois !
Le cœur de leurs bourdons, le front de leurs beffrois
Ont oublié le nombre exact de leurs victimes ;
Leur monstrueux amas barre le firmament ;
Le siècle et son horreur se condensent en elles,
Mais leur âme contient la minute éternelle
Qui date, au long des jours innombrables, le temps.
D’âge en âge, l’histoire est fécondée
Sous l’afflux d’or de leurs idées ;
Leur moelle et leur cerveau
Se ravivent du sang nouveau
Qu’infuse au monde vieux l’espoir ou le génie.
Elles illuminent l’audace et communient
Avec l’espace et fascinent les horizons.
Leur magnétisme est fort comme un poison.
Tout front qui domine les autres,
Savant, penseur, poète, apôtre,
Mêle sa flamme à la lueur de leurs brasiers
Elles dressent vers l’inconnu les escaliers
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