Page:Verhaeren - Les Forces tumultueuses, 1902.djvu/170

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

L’homme qui pense est un héros silencieux ;
Si son âme n’est plus ivre du ciel des dieux,
Ses yeux du moins sont fous de certitude.

Oh son travail et sa fiévreuse solitude
Et son avancement minutieux et lent
Et sa patience attentive et féconde !
Depuis un siècle il a dressé le plan
Magnifique du monde ;
Il a scruté la force et défini
Les lois
Qui retiennent, avec des fils subtils,
Tout l’infini, entre leurs doigts ;
Mais nul n’a violé l’énigme encore altière
Que la matière
Retient captive, au tréfonds de sa nuit.

Oh ce secret dans l’abîme englouti,
Il vous attend, pourtant,
Universelle ardeur des cervelles humaines !

Dites, plonger vers lui et désigner la gaine
Qui le comprime en son étau de haine,
Ou bien trouver le mot, si fou soit-il,