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Que ne répondais-tu quand je cherchais la vie
À la lueur brusque et rouge des jours nouveaux ?
Ton ciel semblait éteint et l’homme en ses travaux
Érigeait contre toi sa force inassouvie.

Ma voix te suppliait quand même, éperdument ;
Mais j’appris qu’en nos temps de pensée errabonde,
Ta face n’était plus le visage du monde
Et je fis mon péché de mon étonnement.

Je tourmentai mon cœur pour qu’il fût encor digne
De t’émouvoir par sa souffrance et ses combats,
Je te l’ouvris béant, mais tu n’y rentras pas
Et tu laissas moisir le raisin sur la vigne.

Seigneur, toi seul connais ce qui s’est fait en moi ;
Et comme il a fallu que l’urgence de vivre
Éperonnât mon être et l’incitât à suivre
Le montueux chemin qui m’éloignait de toi.