Page:Verhaeren - Les Blés mouvants, 1912.djvu/23

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

 
JEAN

Oh ! que ces mots me sont réconfortants et doux.
Depuis deux ans, je n’ai cessé d’être jaloux
De tous ceux-là qui te parlaient le long des haies,
Au bout de ton jardin, où l’or des roseraies
Éclatait en faisceaux dans le soir et la nuit.


KATO

Tu parles du passé et je vis d’aujourd’hui.
Vraiment, il n’est que toi dont les mains m’ont touchée.
Ah ! notre amour à nous, tiens-la dûment cachée
Comme la main protège un feu contre le vent ;
Quoi qu’on dise chez toi, ne réponds à personne.
Seules, la fleur qui pousse et l’herbe qui frissonne
Écouteront le bruit de nos baisers fervents ;
Il ne faut pas que fil à fil et maille à maille
On défasse le fin tissu de nos secrets.