Page:Verhaeren - Les Blés mouvants, 1912.djvu/109

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Un autre est devenu courtier ; un autre encore
S’angoisse en une banque où des comptoirs sonores
Retentissent, dit-il, du bruit de l’univers.
Moi seul, je suis resté, du printemps à l’hiver,
Celui qui tord son gain de sa terre rebelle,
Mais dont le cerveau s’ouvre aux recherches nouvelles.


VINCENT

C’est grâce à vous que j’ai fumé mon champ vivant
Avec l’engrais subtil que compose un savant,
Et que sur le coteau ployé comme une échine,
Mes quatre chevaux noirs traînent l’ample machine
Dont la hâte précise et le jeu net et sûr
Moissonnent tout mon seigle, en un jour, sous l’azur.
Ah ! qu’ils sont loin les temps où s’en venait mon père
Avec sa femme et ses cinq fils, faucher sa terre.