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Alors, j’étais mêlé à sa belle vie ample ;
Je m’attachais à lui comme un de ses rameaux ;
Il se plantait, dans la splendeur, comme un exemple ;
J’aimais plus ardemment le sol, les bois, les eaux,
La plaine immense et nue où les nuages passent ;
J’étais armé de fermeté contre le sort,
Mes bras auraient voulu tenir en eux l’espace ;
Mes muscles et mes nerfs rendaient léger mon corps
Et je criais : « La force est sainte.
Il faut que l’homme imprime son empreinte
Violemment, sur ses desseins hardis :
Elle est celle qui tient les clefs des paradis
Et dont le large poing en fait tourner les portes. »
Et je baisais le tronc noueux, éperdûment,
Et quand le soir se détachait du firmament,
Je me perdais, dans la campagne morte,
Marchant droit devant moi, vers n’importe où,
Avec des cris jaillis du fond de mon cœur fou.