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L’ombre y est tendre, ample, profonde,
Et se parfume, avant d’entrer dans les maisons,
Au toucher clair des floraisons
Dont les seuils s’environnent.
La lumière que jette à la mer le soleil
S’y brise, ainsi qu’une couronne
Dont chaque flot emporte un diamant vermeil.
Aucun ongle de bruit n’y griffe le silence ;
Sans alourdir le temps, les heures s’y balancent,
De l’aube au soir, ainsi que lianes en fleur,
Autour des arbres bleus dans la molle chaleur ;
L’unanime sommeil des bois gagne les plaines ;
La brise passe, avec ses doigts fleurant le miel ;
Les lignes d’ambre et d’or des montagnes lointaines
Dans le matin léger, tremblent au fond du ciel »
 
Et mon esprit disait : « Les plus beaux paysages
Sont heureux d’abriter, sous leurs roses, les sages.
L’homme désire en vain être celui
Qui pousse une lumière au delà de sa nuit
Et s’évade de la blanche prison