Page:Verhaeren - La Guirlande des dunes, 1907.djvu/40

Cette page a été validée par deux contributeurs.

Il perdure seul en un coin,
— Ses fils et ses filles sont mariés au loin —
Il perdure, comptant et recomptant son âge ;
Et son corps va, le dos ployé,
De la cave au grenier, de l’armoire au foyer,
Vaquant aux menus soins de son humble ménage.

Ô le vieux chapelet des jours aux jours liés !
Et les portraits fanés et les bouquets sous verre,
Et le petit bateau sur la pauvre étagère,
Et la bobèche rouge au col du chandelier,
Et la chandelle, et la graisse qui en découle,
Et la chatte, sur l’escabeau, roulée en boule,
Et le Christ et sa croix, et le rameau bénit,
Tandis que la maison entière est pénétrée
De l’odeur des lapins qu’il élève, à l’entrée
De son fournil.

Le petit tablier de son jardin trop maigre
Cache, en ses plis, quelques raves et quelques choux ;
Il protège leur vie, avec des plants de houx,
Contre les mille dents du sable et du vent aigre ;