toilette (1886). Et c’est dans une chambre, deux enfants nus, l’un
debout, l’autre assis, que la lumière, tamisée à travers les rideaux,
baigne. L’atmosphère est ambrée, frêle, douce, chantante. Les chairs
roses, délicatement, s’étalent dans un jour doré sans qu’aucune
brutalité, aucun heurt, aucune dissonance ne dissipe l’impression de
calme et de fraîcheur et d’innocence qui émane de la toile.
La Mangeuse d’huîtres proférait des tons pleins, entiers, majeurs ;
les Enfants à la toilette n’émettent au contraire
que des tons atténués, assourdis et mineurs.
Mais si l’on tient compte de l’aiguë difficulté que les
peintres rencontrent à faire jaillir, non pas de l’opposition ni du
contraste, mais d’un assemblage de teintes voisines, la lumière, les
Enfants à la toilette étonneront plus encore que
la Mangeuse d’huîtres. La clarté apparaît diffuse,
elle ne s’accroche à rien, elle
ne fait aucune saillie ; elle glisse sur les meubles, les tapis et les
chairs. La transparence des stores baissés est parfaite. Jadis avec des
tons profonds et noirs, Ensor résolvait dans l’Après midi à Ostende un
problème analogue. Tout y était fort et discret, dans l’ombre. Ici tout
est fort et discret, dans la clarté.
Enfin voici une toile, toute en tons purs cette fois et toute en violence, où la réalité se mêle à la fantaisie, où les deux routes suivies par l’artiste se rejoignent. La page est intitulée Le Christ faisant son entrée à Bruxelles. Elle ne fut jamais exposée. La date ? — 1888. C’était le temps où les néo-impressionnistes ameutaient les ateliers parisiens. Georges Seurat avec sa théorie de la décomposition lumineuse ou de la division du ton apportait vraiment dans l’art de son temps un procédé