d’un artiste, la beauté des choses les plus quelconques. À côté
de ces dessins très écrits, James Ensor en a réussi d’autres entièrement
baignés d’atmosphère. Un modelé frêle les distingue. Ils participent
plus que les autres à la vie universelle, aux variations de l’heure.
Pour les réussir il faut un tact spécial. Ils sont d’un grain menu et
d’une fragilité choisie. Certains apparaissent comme faits avec de la
poussière rassemblée dans les ombres et dispersée dans les clairs. Des
gris tendres savamment distribués en constituent la beauté précieuse.
Voici le Portrait de Madame Rousseau. Elle est assise à l’avant-plan,
parmi des meubles familiers, non loin d’un bas-relief. Le jour est
tamisé ; tout est en infimes nuances et en atténuation. Il en résulte une
impression de douceur et de calme si grande qu’une mouche survenant la
troublerait, malencontreusement, du simple bruit de ses ailes.
Mon père mort est conçu dans le même esprit. La page est solennelle, sobre, émue. On aperçoit seulement la tête posée parmi les draps que légèrement quelques tons blancs rehaussent. À traits fins, la barbe et les cheveux sont rendus. Le crayon Conté et le crayon gras ont introduit le jeu de leurs différentes accentuations dans les parties sombres. L’ombre s’anime, mais uniquement afin d’éviter qu’elle ne soit opaque : il faut que la seule sérénité règne dans l’étude entière. Le dessin est du reste irréprochable. Le nez, les yeux et le front sont nets sans dureté, les chairs sont admirablement apalies quoique consistantes encore.
Cette même manière de nuancer un dessin sans l’affadir ni le banaliser se retrouve dans le Portrait de