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Il était doux pour toutes mes colères ;
Je l’ai tué comme on achève un chien,
Un soir, que j’étais ivre !

LE PRIEUR

N’écoutez pas ! N’écoutez pas !
Au nom du Dieu vivant, n’écoutez pas !

DOM BALTHAZAR

Un innocent fut condamné
Et tué à ma place ;
Il priait Dieu et criait grâce.
Il embrassait le Christ en croix.
J’étais présent, j’assistai froid,
Et sans bouger, à ce martyre.
Un geste, un mot, un seul à dire,
Et le glaive n’aurait point flamboyé ;
Et je l’ai tu, ce mot, je l’ai broyé
Entre mes dents, je l’ai mangé.

LE PRIEUR (désignant DOM BALTHAZAR aux moines)

Qu’on l’arrache par force, de la tribune.