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les villes à pignons
Et, quand ils passent,

Avec leur char aux cent tonneaux,
Sur la grand’place,
Ils font trembler plus d’un carreau
Qui, dans le soir, scintille

Aux fenêtres en or du vieil hôtel de ville.


L’homme est hospitalier, facile et cordial ;

Dans sa maison au long trottoir, près du canal,
La bière,
À celui qui la boit devant un feu vermeil,
Semble sortir en robe de soleil

Du creux des verres.


Sa femme saine et grasse, et ses enfants replets ;

Dans un coin de la cour, à l’ombre des ramures,
Elle-même, les mois d’été, puise aux baquets
Et verse aux boulangers les mousseuses levures :
C’est son modeste orgueil, quand est meilleur le pain
Et puis, le soir, quand la lampe brûle, ses mains,
Calcul après calcul, s’acharnent à poursuivre

La piste des erreurs au taillis du grand-Livre.


Et d’année en année, en s’aidant, tous les jours,
La femme ardente au gain, et l’homme âpre aux négoces