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œuvres de émile verhaeren
L’AIR SE DURCIT
L’air se durcit, le gel va ressaisir la nuit.
Les roses du pignon tremblent au vent qui passe,
Une dernière abeille entre dans les fleurs lasses,
Et tout à coup s’angoisse et brusquement s’enfuit.
Les mille bruits du soir montent des vieux villages,
Plus nets et plus vrillants qu’aux jours secs de l’été ;
Une tenace, vieille et morne hostilité
Semble habiter l’ornière où grince un attelage.
Plaintes des puits, douleurs des seuils, cris des verrous,
Vous perforez le cœur transi de l’étendue ;
Tout devient crainte, attente et misère tordue
Entre les dents du froid qui mord comme les loups.