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Et pâle et haletante
Et si terriblement
Que son moment d’élan vaut, à lui seul, le temps
Que met un siècle en gravitant
Autour de ses cent ans d’attente.

Tout ce qui fut rêvé jadis,
Ce que les fronts les plus hardis
Vers l’avenir ont instauré ;
Ce que les âmes ont brandi,
Ce que les yeux ont imploré,
Ce que toute la sève humaine
Silencieuse a renfermé,
S’épanouit, aux mille bras armés
De ces foules, brassant leur houle avec leur haine.

C’est la fête du sang qui se déploie,
À travers la terreur, en étendards de joie :
Des gens passent rouges et ivres,
Des gens passent sur des gens morts ;
Les soldats clairs, casqués de cuivre,
Ne sachant plus où sont les droits, où sont les torts,