un enfant qui venait de voler un veau, Marchildon, son assistant, entra.
— Si ça se répète, mon petit Euclide, dit Verchères à l’enfant, je te fais passer 24 heures au cachot. Va et ne pèche plus.
Euclide sortit pendant que Gérard se tirait une chaise et y déposait son corps lourd de musculature.
— Tout va pour le mieux, chef, dit-il…
— Heu… ?
— Il n’y a presque personne dans les deux salounes ; je reviens du camp de mineurs ; tout le monde est sage comme des images. Je crois que la présence seule de monsieur l’Abbé Taché commence à porter des fruits.
— J’en doute un peu, mon jeune.
— Comment ça ?
— Cette sagesse sans précédent ne me dit rien qui vaille. J’ai peur…
— Peur ?
— Oui, j’ai peur que Dougald, Monroe et leur bande de hors-la-loi ne soient à monter un de ces coups diaboliques.
— Ils oseraient ?
— Oui, je crains pour dimanche…
Marchildon questionna :
— Ils auraient, croyez-vous, l’audace de s’attaquer à un prêtre ?
— Oui.
— Mais pourquoi ?
— Parce que ce prêtre vanterait les vertus qu’ils ne possèdent point et dénoncerait les vices dans lesquels ils gagnent leur vie. L’Abbé Taché est pour eux une menace presque directe.
— Quand frapperont-ils ?
— À l’office religieux de dimanche sans doute.
— Baptiste demanda :
— As-tu vu l’Abbé aujourd’hui ?
— Oui, je viens de le laisser. Il a terminé l’installation de la grande tente que vous lui avez prêtée ; il a acheté du bois chez le marchand et Huguette et lui sont en train de construire des bancs rudimentaires pour les fidèles.
— T’a-t-il dit quel ordre il suivra dimanche ?
— Oui, il fera son sermon d’abord ; après quoi il dira la messe.
— Une messe basse ?
— Évidement, car il n’a pas le temps d’ici là de driler des chantres.
Le vieux Verchères se leva :
— Je vais à la maison ; garde le bureau, dit-il à Marchildon.
La résidence du chef était tout près de la station de police.