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64 F RA G M EN TS. mal choisis; ones de leur place, ils peuvent ne pas faire leur impression ; enfin, ils ne représentent qu’une petite par- tie des beautés dedilférent genre dont les ouvrages de ces grands hommes sont remplis. Ceux qui out lu les ouvrages dont je parle savent bien qu’il n’est pas possible de les faire connaltre par des passages sicourts ; mais ils n’ont pas be- ` soin qu’on leur en dise davantage, pour se souvenir de ce qu’ils ont lu. A l’égard de ceux qui n’ont rien lu_, je ne fais que leur indiquer les sources du beau, sans prétendre a prévenir, ou a forcer leur jugement. Je suis comme ces an- tiquaires qui; dans les grandes villes, se louent aux étranl gers, pour leur montrer les beautés du pays : ces gens—la ont entendu parler des chefs-d’u-zuvre de leur patrie; par exem ple, a Rome, ils menent les étrangers a l’Eglise de Saint- Pierre, et ils leur disent-x it Voyez·vous cette statue ? elle it est du Bernini; admirez la hardiesse de cette figure, elle · it est de Miehel·Ange. » Les étrangers qui n’ont point de gout, s’en` tiennent a ces instructions; mais ceux qui sont en état de juger par eux-memes, voient bien au·-dela de ce qu’on leur montre, et ils portent leurs réllexions beaucoup plus loin que ceux qui font métier de parler aux autres de I ces sortes de choses. Et qu’on ne disc pas que des Francais n’ont pas besoin qu’on les avertisse des beautés de leurs propres écrivains : cela peut etre vrai a Yégard des poetes dont les vers- demeurent aisément dans la mémoire, et que l’on fait reparaltre souventsur le th éatre *; cela peut etre vrai a l’égard des historiens, parce que l'étude de l’histoire entre dans Péducation de la jeunesse; mais cela n’est‘point vrai , pour les ouvrages de pure eloquence; car peude gens les . lisent, et moins encore se souviennent de ce qu’ils en ont lu. Nous- sommes, d’ailleurs, dans l’opinion que nous n’avons point égalé les anciens pour Péloquence, et cela peut bien étre v1·ai a l'égard de plusieurs de ses parties; ils en ont Jllnrie-7'hérése et du grand Condé; enlln, de La Bruyere, le sur l’en· treprise du prince d’Urange. —· G. ·

  • Voir.le 11• Dialogue ( Racine et Boksuet ). — G.