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· _(10llRESPONDANCE._ {D3 et pourrait revenir a M. de Meyronnet, avec qui je ne suis pas bien, et qui se figurerait que j’improuve sa conduite passée a l’égard du chevalier, au sujet des mauvaises au- berges. ` ` 59. — MIRABEAU A VAUVENARGUES. r { De Paris, ce M avril t'I40. Je vous suis bien oblige, mon cher Vauvenargues, de la bonté que avez de vous intéresser a ce qui regarde mon frere; une preuve de ma contlance, c’est que je raisonne avec vous; je n’en fais pas de meme avec tout le monde. · i Vos idées sont bonnes, d’un coté; mais ce n’est pas celui que je veux ~ donner a mon frere; je ne suis pas embarrassé qu‘il n’ait l‘air d‘un homme de condition, et c’est tout ce que je lui demande; quant al ce clinquant du monde, auquel vous prétendez qu’il faut s`apprivoiser, pour n’en etre pas ébloui, je suis persuade qu’il nous entratne et nous otfusque, quand nous débutons par—la; nous ne connaissons, ni ne vou-

  • Ions connattre autre chose, et adieu! Je n’espere pas faire de mon frere

un homme parfait; il faut donc se toumer du meilleur coté : c’est, sans contredit, celui de Phonnete homme; tout le monde l'est, mais non pas selon moi. ._ _ tl n`est point en nous de principes innés; le foyer paternel en donne quelques-uns, mais que sont-ils, sans connaissances? Bien! Mon frere a eu moins d’éducalion que nous, mais il est dans Page d’apprendre, ou jamais; mon idée est donc de lui rendre ce que m`ont prété deux amis, ai qui je dois tout, jusqu’a mes principes de probité (car il faut s’en faire: autrement, if n’y a ni vices ni vertus, comme disait le Regent), de le mettre, dis—je, a meme de prendre une connaissance de Phistoire, pour qu‘il puisse juger de l’absurde de ce qui l’environne; et qu’entln, il parte pour Malte, se regardant comme cosmopolite, et au-dessus de la force inutile de son pays, qui en caractérise si bien le néant. Quant au . monde, il saura ensuite s’en passer, et vivre avec lui-meme, avoir un caractere et une allure en propre, sans se livrer sans cesse a la der? niere impression. Voila mon dessein sur lui; je l’aime, jusqu‘a present, de droit, et je lui dois ces soins; s’il n’y répond pas, je sais qu‘il est en age de commencer a avoir des volontés, et, pourvu qu‘il ne s‘écarte point des lois de Phonneur, je suis certain que je n'aurai rien a lui