Page:Vauvenargues - Œuvres posthumes éd. Gilbert.djvu/196

Cette page n’a pas encore été corrigée

I80 COBRESPONDANCE. tauban; vos lignes et vos mots sont si serrés, vous mettez si peu de virgules et de points, que le plaisir de vous lire n’est point du tout un plaisir pur. Mandez-moi, je vous supplie, ce que vous faites cet été; s’il vous prenait quel- que envie de passer l’hiver en Provence, je parle de l’hiver procbain, nous pourrions nous y rencontrer. Je m°eunuie de trainer mon esponton * dans la boue, a la tete de vingt . hommes, et de faire ainsi amende honorable dans les rues, avec la redingote, et la pluie sur le corps; mais comme je n’ai point d’asile, je tache de me supporter. Continuez-moi vos conseils; tout ce que je vous dis de moi ne doit pas les retenir, car il n’est rien de moins stable que les pensées d’un homme inquiet et valétudinaire ’ ; je ne veux pas que vous m’abandonniez. Adieu, mon cher Mirabeau: si j’avais plus de papier, j’aurais peine a vous quitter. 53. — MIRABEAU A VAUVENARGUES. De Paris, ce I3 mars IHO. Vous etes bien plus fort et bien plus consequent sur Ia verité que sur le sophisme, mon cher Vauvenargues; c`est le propre d’un esprit juste. Vous vous etes réhabilité dans vos droits, par cette derniere lettre: suivez la raison, mon cher ami; votre esprit vous y porte, et métiez—vous de ses lumieres, quand il voudra s’en eloigner '. Mes jours sont sereins, depuis que j'ai p1·is mon parti; je vois courir la meme lice, ou je me suis si vainement lassé autrefois, e des malheureux dont je plains le sort. On attend tous les jours une promotion; j’ai essuye bien des assauts, ` pour faire, au moins, quelques démarches; l‘on me montrait les plus belles espérances, et cela, tant les bureaux que le ministre; j`ai ré-

  • Sorte de demi-pique, que portaient nlors les oliiciers d’infanterie, et dont

Vusage fut aboli, en meme temps que celui de la hsllebarde, en 1756. — G.

  • En etl’et, dans cette lettre meme, nous avons eu Ia preuve que les pensées

de Vauvenargues ne sont pas toujours constantes. — G. 3 Dans cette phrase mal construite, les lumiércs dont il est question sont celles dc Pesprit de Vauvenargues, dont Vauvenargues devra se mé/ler, quand cet esprit voudra féloigner dc la raison. — G.